Deauville 2016/ Brooklyn Village de Ira Sachs : critique

Publié par Antoine Gaudé le 9 septembre 2016

Synopsis : Une famille de Manhattan hérite d’une maison à Brooklyn, dont le rez-de-chaussée est occupé par la boutique de Leonor, une couturière latino-américaine. Les relations sont d’abord très cordiales, notamment grâce à l’insouciante amitié qui se noue entre Tony et Jake, les enfants des deux foyers. Mais le loyer de la boutique s’avère bien inférieur aux besoins des nouveaux arrivants. Les discussions d’adultes vont bientôt perturber la complicité entre voisins.

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Brooklyn Village - affiche

Brooklyn Village – affiche

Grand habitué du Festival de Deauville pour avoir présenté quatre longs métrages dont LOVE IS STRANGE (notre critique), Ira Sachs revient en terre normande, frappe encore très fort cette année avec Brooklyn Village et rafle naturellement le Grand Prix. Récit d’une belle amitié entre deux adolescents voisins à Brooklyn, ce drame est également une étude sociologique de la vie du quartier new-yorkais, devenu place incontournable de Big Apple. Branché et bohême, Brooklyn attise logiquement les convoitises les plus diverses. Et lorsque la famille Jardine récupère l’appartement du grand-père décédé, c’est la vie de Leonor et de son fils Tony qui s’apprête à changer. La puissance émotionnelle du récit tient dans le regard qu’il porte sur ces gens « normaux ». Sachs est effectivement passé maître dans la manière d’agencer des relations humaines d’une intense profondeur avec une facilité d’écriture remarquable. Il est l’un des rares cinéastes américains actuels à être capable de traiter autant de personnages dans un film de moins d’une heure et demie et de leur conférer à tous une dimension humaine complexe, pertinente et sincère. Malgré leur apparente différence, l’amitié qui lie Jake (artiste introverti) et Tony (plutôt extraverti) dépasse largement les différences physiques, relationnelles, sociales. Contrairement à celles plus pécuniaires des parents qui vont détériorer progressivement leur relation.

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Brooklyn Village

Brooklyn Village

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Comme souvent dans le cinéma de Sachs, les acteurs sont tous excellents avec de véritables révélations, comme Theo Taplitz (Jake) et Michael Barbieri (Tony). La photographie est également splendide et participe pleinement à l’atmosphère libertaire qui émane de la tonalité colorée et légère du film. Chaque fils vit ainsi son rêve jusqu’au bout, à savoir intégrer une prestigieuse école artistique. Dans les oeuvres de Sachs, la tragédie, à l’image du deuil dans Brooklyn Village, n’est jamais vécue comme quelque chose d’insurmontable, de misérabiliste. Elle est tout simplement liée à notre condition d’homme. On a évidemment le droit de pleurer la perte d’un être cher, d’une amitié ou d’un travail, mais la vie reprend toujours son cours. Le temps fait ainsi son oeuvre, sur l’homme mais aussi sur l’image ; on souligne notamment le magnifique travail sur les ellipses. C’est dans l’aspect éphémère des choses que le cinéma de Sachs se rapproche de celui du maître japonais, Yasujiro Ozu (Bonjour, Et pourtant nous sommes nés…). Ils possèdent le même rapport à l’espace, à la famille et à l’intime. Avec assez peu de lieux et le plus souvent clos, ils parviennent, par un découpage sobre de l’espace, à saisir la sensibilité cristalline de leurs personnages, leurs ressentis le plus profond. Rien de spectaculaire ou de superflu, le cinéma de Sachs ne surenchérit aucune situation potentiellement dramatique. Il garde cette distance sereine avec ses personnages qui lui permet de souligner les aléas de chaque vie dans ce qu’ils ont de plus beau.

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  • BROOKLYN VILLAGE (Little Men) de Ira Sachs en salles le 21 septembre 2016.
  • Avec : Theo Taplitz, Michael Barbieri, Greg Kinnear, Jennifer Ehle, Alfred Molina, Talia Balsam, Clara Foley, Arthur J. Nascarella…
  • Scénario : Ira Sachs, Mauricio Zacharias
  • Production : Ira Sachs, Lucas Joaquin
  • Photographie : Oscar Duran
  • Montage : Mollie Goldstein, Affonso Gonçalves
  • Décors : Alexandra Schaller
  • Costumes : Eden Miller
  • Musique : Dickon Hinchliffe
  • Distribution : Version Originale / Condor
  • Durée : 1h25

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