Synopsis : La traque de Jason Bourne par les services secrets américains se poursuit. Des îles Canaries à Londres en passant par Las Vegas…
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Dans l’univers si fermé des films d’espionnage, Jason Bourne, inspiré des romans de Robert Ludlum, a constitué une révolution dans la manière de filmer le cinéma d’action, à l’époque où James Bond et Ethan Hunt poursuivaient leur petit bonhomme de chemin sans réellement se réinventer. Le premier volet, La mémoire dans la peau de Doug Liman (2002), a su injecter une bonne dose de réalisme et rencontrer son public, en amassant 214 millions de dollars de recettes mondiales pour un budget de « seulement » 60 millions. Il a également permis à Matt Damon de relancer sa carrière après quelques flops successifs (Titan A.E, La légende de Bagger Vance…). En toute logique, cette première tentative, concluante, a fait l’objet de deux suites avec à la tête un nouveau réalisateur, Paul Greengrass, révélé par Bloody Sunday (2002). La mort dans la peau (2004) et La vengeance dans la peau (2007) furent un succès, récoltant respectivement dans le monde 288M$ (75M$ de budget) et 442M$ (pour 110M$). Alors que Universal souhaite lancer un quatrième opus, Paul Greengrass préfère se retirer et Matt Damon décide de le suivre. Tony Gilroy, à l’écriture de la trilogie, prend finalement le gouvernail en 2012 pour JASON BOURNE L’HERITAGE (notre critique), d’après le roman d’Eric Van Lustbader, dans lequel Jeremy Renner remplace Matt Damon dans la peau d’un autre espion, Aaron Cross. Un spin-off qui divisa le public et la critique à sa sortie.
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Aujourd’hui, sobrement titré Jason Bourne, ce cinquième volet de la saga – et quatrième pour Matt Damon – renoue avec le célèbre espion amnésique. Retrouvé en pleine mer, il s’est affranchi de la CIA qui l’a manipulé. La trilogie avait comme force principale de reposer sur la longue et difficile quête de ses origines et de ses souvenirs. Ici, il s’agit davantage de reconstituer le puzzle à travers les multiples flashbacks autour de la mort de son père dans des conditions étranges. Avec toujours son style si singulier, Paul Greengrass poursuit son exploration du genre à l’esthétique quasi documentaire et réaliste entre shaky cam, montage cut et l’âpreté de la photographie de Barry Ackroyd (Vol 93, Green Zone, CAPITAINE PHILLIPS – notre critique). À sa mise en scène s’ajoutent les actualités récentes, comme le scandale de la NSA, le cas Snowden, les écoutes ou encore les manifestations anti-austérité en Grèce. L’ensemble rend ce nouvel opus foisonnant mais aussi parfois complexe devant l’accumulation de tout le jargon technique et informatique. Mais comme de coutume, les deux heures offrent leur lot de cascades spectaculaires situées aux quatre coins du globe, entre scènes d’émeutes à Athènes, bastons à mains nues à Londres ou encore cette course poursuite impressionnante dans les rues de Las Vegas.
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De retour neuf ans plus tard et avec seulement une vingtaines de lignes de dialogues, Matt Damon prouve à nouveau qu’il est en grande forme, après sa dernière prestation notable dans SEUL SUR MARS de Ridley Scott (notre critique). Hanté par la psychologie de ce personnage iconique, il transforme Jason Bourne en une puissance en perpétuel mouvement empreinte d’une réelle humanité. S’il parle peu ici, sa performance physique, elle, est parfaitement loquace. Rappelons que cette franchise représente le plus gros succès de sa filmographie. Mais plus globalement, l’ensemble du casting se révèle convaincant. L’envoûtante Alicia Vikander joue la carte de l’ambiguïté dans le rôle d’une responsable informaticienne au département de la cyber-criminalité de la CIA. Le tétanisant Tommy Lee Jones, qui fêtera ses 70 ans en septembre prochain, s’impose dans la peau du directeur de l’agence de renseignement et traqueur de Jason Bourne. Quant à Vincent Cassel, son interprétation d’homme de main, engagé pour abattre cet éternel fugitif, lui sied à merveille. L’intrigue, coécrite cette fois par Paul Greengrass et Christopher Rouse – et non plus par Tony Gilroy -, conserve son même schéma narratif tout en privilégiant ici l’action pure au profit de l’espionnage. Ce choix de Greengrass rend le film prenant, délivrant ça et là des réponses sur le background de ce personnage mythique, encore et toujours poursuivi par la CIA. Au milieu de cette surenchère d’effets numériques dans les récentes superproductions, le réalisme de Jason Bourne s’avère ainsi le bienvenu. Et si l’on en croit Universal, c’est probablement le début d’une nouvelle trilogie…
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Alexis Gonçalves
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- JASON BOURNE réalisé par Paul Greengrass en salles depuis le 10 août 2016.
- Avec : Matt Damon, Tommy Lee Jones, Alicia Vikander, Vincent Cassel, Julie Stiles, Riz Ahmed, Ato Essandoh, Scott Shepherd…
- Scénario : Paul Greengrass, Christopher Rouse
- Production : Frank Marshall, Jeffrey Weiner, Matt Damon, Paul Greengrass, Ben Smith
- Photographie : Barry Ackroyd
- Montage : Christopher Rouse
- Décors : Paul Kirby
- Costumes : Mark Bridges
- Musique : David Buckley, John Powell
- Distribution : Universal Pictures
- Durée : 2h04
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