Synopsis : Stella, jeune fille de 12 ans un peu rondelette, admire intensément Katja, sa grande sœur. Comme elle, elle s’entraîne pour devenir une championne de patinage artistique mais ses efforts demeurent vains. Katja possède quant à elle d’évidents talents et un avenir radieux dans son sport semble l’appeler. Toutefois, la pression et les rudes séances de préparation qu’elle s’inflige vont bientôt avoir raison de sa résistance. Stella découvre alors que son aînée souffre d’anorexie. Bouleversée par ce lourd secret, la cadette menace de tout révéler à leurs parents.
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My Skinny Sister est le premier long métrage de Sanna Lenken. La Suédoise s’était distinguée à la Berlinale 2013 avec Eating Lunch, format court dédié aux jeunes filles souffrant d’anorexie. La scénariste-réalisatrice reprend ce thème en version longue, en réussissant à l’évoquer de manière didactique, profonde et documentée. Par le regard de Stella, la petite sœur qui voit son aînée s’enfoncer dans l’enfer de l’anorexie, elle prend de la distance et évite le mélodrame trop appuyé. Elle peut ainsi aborder d’autres sujets de manière subtile. Rapports entre sœurs, passage de l’enfance à l’adolescence, exigences du sport de haut niveau et difficulté d’être parents dans nos sociétés modernes sont peints avec une grande justesse. Quelques répliques de Stella, personnage principal naïf et attachant, ajoutent une touche d’humour savamment dosé. Grâce à un scénario habile, Sanna Lenken parvient à surprendre le spectateur qui s’attend au départ à la description du malaise d’une fillette en surpoids, complexée par son physique. Stella peine à égaler les prouesses de sa grande sœur sur la glace, et subit les échecs inéluctables dus à ses faiblesses. Pour ne rien arranger, elle s’éprend de l’entraîneur de son aînée. Stella aimerait évidemment sortir de l’ombre de Katja, dont le talent aimante l’attention de ses parents. Or, on assiste progressivement à une complète inversion des rôles. L’enjeu majeur du film n’apparaît alors qu’à mi-chemin. La cadette s’épanouit progressivement tandis que l’aînée presque parfaite commence à douter, subit la pression d’un sport exigeant, et sombre dans l’anorexie.
Dès lors, l’apparent idéal familial du début vole en éclats face à une pathologie que Katja s’est efforcée de cacher le plus longtemps possible. Stella, contrainte au silence, doit le briser pour éviter à sa sœur une issue fatale. Construisant son indépendance, elle acquiert assurance et force, s’émancipe avec les jeunes de son âge. L’alcool et les garçons entrent dans sa vie en même temps que le sens des responsabilités et les épreuves familiales. Telle l’arabesque d’une patineuse, Sanna Lenken trace une relation forte entre deux sœurs. L’évolution de leurs rapports, de la rivalité initiale à la nécessaire complicité qui lui succède, constitue le fil conducteur de l’intrigue. Le jeu des deux jeunes comédiennes, pour lesquelles il s’agit d’un premier rôle, s’avère largement à la hauteur. Une mise en scène intimiste et deux héroïnes cadrées de près contribuent à plonger le spectateur dans l’histoire. On aurait simplement aimé un peu plus d’audace dans les dialogues, parfois un peu convenus, et davantage de punch dans le déroulement. L’action assez lente entraîne en effet quelques baisses de rythme. My Skinny Sister réserve néanmoins des moments intenses et diffuse une belle émotion.
Christophe Binet
- MY SKINNY SISTER (Min Lilla Syster) écrit et réalisé par Sanna Lenken en salles le 16 décembre 2015.
- Avec : Rebecka Josephson, Amy Deasismont, Henrik Norlén, Annika Hallin, Maxim Mehmet, Ellen Lindbom, Asa Janson, Hugo Wijk…
- Production : Annika Rogell
- Photographie : Moritz Schultheiss
- Montage : Hanna Lejonqvist
- Décors : Lisa Öman
- Costumes : Katarina de Bourg, Mimmi Harms Oredsson
- Musique : Störby Jutbring
- Distribution : Urban Distribution
- Durée : 1h35
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