Livre / Stéphane Brizé, Vincent Lindon. Les plans de bataille : critique

Publié par Jacques Demange le 16 février 2022

Résumé : La sortie prochainement du cinquième film que Stéphane Brizé réalise avec Vincent Lindon, ainsi que sa sélection à la Mostra de Venise cette année sont l’occasion de se replonger dans l’œuvre que les deux hommes ont construite ensemble depuis plus de 10 ans.

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Stephane Brize-Vincent Lindon - livre

Stephane Briz̩, Vincent Lindon Рlivre

De son précédent essai (Retour à Philadelphie. Promenade amoureuse et analytique avec Sylvester Stallone, paru en 2020 chez LettMotif), Quentin Victory Leydier, enseignant en lettres modernes, a su conserver la forme libre, parfois déliée, et la sincérité d’un ton proche de la confidence. L’auteur ne s’en cache pas : s’il a voulu consacrer un ouvrage aux collaborations de Stéphane Brizé et de Vincent Lindon, c’est d’abord et principalement parce qu’il les a aimées. De fait, sa démarche rappelle en quoi la cinéphilie peut se penser comme un acte de transposition, l’élection d’un petit nombre de films acquérant la plénitude de l’œuvre par le geste d’écriture qui cherche à les décrire, les commenter, et les interpréter. Entrecoupé d’entractes qui reviennent sur la façon dont l’essayiste a découvert et éprouvé les titres étudiés, l’ouvrage creuse un sillon original, préservant le goût subjectif tout en respectant la visée scientifique de l’essai. Mademoiselle Chambon [2009] est ainsi d’emblée présenté comme le film le moins apprécié du corpus, tandis que de nombreuses séquences donnent lieu à des apartés renvoyant à des considérations plus générales (et souvent justes) sur le cinéma français. Ces remarques accompagnent sans jamais se substituer aux réflexions attendues sur le cinéma de Brizé. La volonté de cinéaste de donner corps aux invisibilités se décline à travers des thématiques engagées et une caractérisation des personnages pleines d’authenticité. Mais aussi par le biais d’une mise en scène qui confère une importance certaine à la quotidienneté et au temps mort (à l’exception de En guerre [2018] dont l’auteur s’emploie à décrire le tempo singulier). Ce sont les grandes tragédies de la normalité que filme Brizé, érigeant l’anecdotique comme élément essentiel de sa dramaturgie.

 

Ainsi des séquences de repas que l’on consomme ou que l’on prépare (les scènes de cuisine de Quelques heures de printemps [2012] qui donnent lieu à de belles pages sur la solitude et la communication silencieuse), des formules de langage, des effets de montage dont la simplicité apparente recèle de belles trouvailles intérieures (le montage en champ-contrechamp qui derrière son évidence offre des indices sur l’évolution du récit). On retiendra ce souci de conceptualisation qui donne lieu à d’excellentes propositions. Ainsi des « plans-séquences expansés » dont l’auteur refuse par humilité de reconnaître la pertinence pourtant bien réelle et dont l’usage peut tout à fait dépasser le cadre du cinéma de Brizé. 

 

L’excellence de ces remarques fait quelque peu regretter que le second nom du titre n’ait pas profité de la même rigueur analytique. De Vincent Lindon, l’auteur rappelle la qualité artisanale de ses interprétations qui, de façon un peu rapide, lui permet de considérer l’acteur comme rétif à la performance (quid de Rodin [Jacques Doillon, 2017] qui le voyait adopter une barbe drue pour transformer son faciès ou de Titane [Julia Ducournau, 2021] dans lequel il affichait sans complexe son anatomie musculeuse ?).

 

L’impact de ses apparitions à l’écran se limite alors à quelques appréciations qui peinent à dépasser le degré premier de l’admiration. Il y aurait pourtant beaucoup à dire sur la présence corporelle de Lindon, sur ses marmonnements et son mutisme qui s’inscrivent en plein dans l’esprit du cinéma de Brizé fait de silences, de non-dits et de latences. Difficile pourtant de ne pas entretenir d’affinités avec l’écriture de Leydier dont le style parvient à faire entendre et ressentir le souffle si singulier qui anime les images de Brizé.

 

 

 

  • STÉPHANE BRIZÉ, VINCENT LINDON. LES PLANS DE BATAILLE
  • Auteur : Quentin Victory Leydier
  • Préface : Thomas Porcher
  • Éditions : LettMotif
  • Date de parution : 16 février 2022
  • Langues : Français uniquement
  • Format : 260 pages
  • Tarifs : 26 € (print) – 14,90 € (numérique)

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