La 47e cérémonie des César 2022 a eu lieu ce vendredi 25 février à l’Olympia afin de célébrer le retour du cinéma avec le triomphe d’Illusions perdues et Annette, bien que marquée émotionnellement par la mort de Gaspard Ulliel et l’invasion de l’Ukraine.
Avec les deux dernières cérémonies imprégnées d’accusations de sexisme, puis de revendications politiques, la 47e édition des César aurait dû fêter une nouvelle année de cinéma placée sous la réouverture des salles et le renouveau de l’Académie, mais l’ambiance était pesante dans la salle.
En dépit du discours sobre d’Antoine de Caunes, qui revenait en tant que maître de cérémonie depuis 2013, enjoignant à louer le cinéma, les pensées étaient tournées vers la situation en Ukraine et la disparition de Gaspard Ulliel en janvier dernier.
Des gagnants sans surprise…
Grand favori, et long-métrage ayant reçu le plus de nomination, Illusions Perdues remporte 7 récompenses sur ses 15 nominations. Ce drame historique français basé sur l’œuvre d’Honoré de Balzac a, bien entendu, hérité des César des Meilleurs costumes, décors et adaptation. Benjamin Voisin, révélé dans Été 85 de François Ozon, repart avec celui de l’Espoir masculin. Illusions perdues a surtout été sacré Meilleur Film. Un dénouement attendu pour ce long-métrage d’époque adapté d’un des fleurons de la littérature française.
Le musical Annette, porté par Adam Driver et Marion Cotillard, signant le retour de Leos Carax, associé aux frères du groupe The Sparks, remporte les catégories techniques : Meilleur son, musique originale, montage et effets visuels. Dix ans après Holy Motors, qui avait seulement été nommé pour les César en 2013, Leos Carax remporte enfin le prix de la Meilleure réalisation, après avoir reçu celui de la mise en scène à Cannes.
… ou presque
Annoncé et presque vendu d’avance, Adam Driver ne sera pas le 3e américain à recevoir le César du Meilleur acteur. C’est Benoît Magimel qui l’a obtenu grâce à son rôle dans De son vivant d’Emmanuelle Bercot. L’acteur n’avait, jusque-là, seulement été nommé dans la catégorie Meilleur acteur dans un second rôle, qu’il avait remporté en 2016 pour La Tête Haute, également d’Emmanuelle Bercot.
Dans un schéma identique, Virginie Efira était donnée grande gagnante pour son rôle dans Benedetta, le dernier Paul Verhoeven. Son précédent film, Elle, avait permis à Isabelle Huppert de repartir avec le César de la Meilleure actrice en 2017. Néanmoins, c’est Valérie Lemercier qui est montée sur scène afin de soulever la statuette grâce à son interprétation fictionnalisée de Céline Dion dans Aline. Il s’agit de la seconde actrice à recevoir cette récompense pour un film qu’elle a elle-même écrit et réalisé.
Concernant le César du Meilleur Film étranger, malgré de sérieux concurrents tels que Drive My Car et Julie (en 12 chapitres), c’est le français Florian Zeller qui l’emporte avec The Father.
L’omniprésence de la crise actuelle
Dans son discours d’ouverture, Antoine de Caunes s’est exprimé sur la situation en Ukraine : « Comment ne pas évoquer ce qui se passe en ce moment même à trois heures d’ici ? Eh bien, déjà en disant que ce que nous célébrons au César est précieux. L’Art, la parole libre, le travail d’équipe… On serait mal placé pour donner des leçons. On s’est fait beau, on va rire, on va être ému… Parce que l’essence de notre métier, c’est de continuer quoi qu’il arrive. Même si le monde semble s’effondrer autour de nous. Ce soir, pensons aux Ukrainiens et soyons à la hauteur de la chance qu’ils n’ont pas. »
Des paroles qui semblent répondre à certaines critiques pointant du doigt l’insensibilité de maintenir un tel événement alors qu’un pays est bombardé, et rappeler les limites revendicatrices du cinéma. Cela fait suite à la précédente édition qui avait choqué par la rancœur envers le gouvernement, accusé de laisser la culture à l’agonie en pleine crise du Covid.
Néanmoins, certains films dans la sélection témoignaient des préoccupations françaises : BAC Nord, La Fracture et L’Événement, film sur l’avortement dans les années 1960. Le premier a fait chou blanc, tandis que les deux autres ont remporté respectivement les César de Meilleure actrice dans un second rôle pour Aissatou Diallo Sagna et Meilleur espoir féminin pour Anamaria Vartolomei.
Antoine de Caunes a également rappelé que cette 47e cérémonie accueillait Julia Ducournau, Palme d’Or pour Titane, et Audrey Diwan, Lion d’Or pour L’Événement, dans une représentation des femmes dans le milieu du cinéma. Celles-ci ont néanmoins été oubliées des récompenses. Notamment Julia Ducournau qui ne pourra décidément compter que sur Cannes en guise de mise en avant, boudée des César et des Oscars, malgré sa sélection pour représenter la France.
Finalement, cette cérémonie témoigne encore des stigmates laissés par la pandémie sur le milieu du cinéma et d’autres problèmes politisés des dernières années, saupoudrée d’une guerre à l’Est qui marque ce rassemblement autour du 7e art.
Emilie Bollache
PALMARÈS CÉSAR 2022
Meilleur film
- « Aline » de Valérie Lemercier
- « Annette » de Leos Carax
- « BAC Nord » de Cédric Jimenez
- « L’Événement » de Audrey Diwan
- « La Fracture » de Catherine Corsini
- « Illusions Perdues » de Xavier Giannoli
- « Onoda, 10 000 nuits dans la jungle » de Arthur Harari
Meilleur réalisation
- Valérie Lemercier pour « Aline »
- Leos Carax pour « Annette »
- Cédric Jimenez pour « BAC Nord »
- Audrey Diwan pour « L’Événement »
- Xavier Giannoli pour « Illusions Perdues »
- Arthur Harari pour « Onoda, 10 000 nuits dans la jungle »
- Julia Ducournau pour « Titane »
Meilleure actrice
- Leïla Bekhti dans « Les Intranquilles »
- Valeria Bruni Tedeschi dans « La Fracture »
- Laure Calamy dans « Une femme du monde »
- Virginie Efira dans « Benedetta »
- Vicky Krieps dans « Serre moi fort »
- Valérie Lemercier dans « Aline »
- Léa Seydoux dans « France »
Meilleur acteur
- Damien Bonnard dans « Les Intranquilles »
- Adam Driver dans « Annette »
- Gilles Lellouche dans « BAC Nord »
- Vincent Macaigne dans « Médecin de nuit »
- Benoît Magimel dans « De son vivant »
- Pio Marmaï dans « La Fracture »
- Pierre Niney dans « Boîte Noire »
Meilleure actrice dans un second rôle
- Jeanne Balibar dans « Illusions Perdues »
- Cécile de France dans « Illusions Perdues »
- Aissatou Diallo Sagna dans « La Fracture »
- Adèle Exarchopoulos dans « Mandibules »
- Danielle Fichaud dans « Aline »
Meilleur acteur dans un second rôle
- François Civil dans « BAC Nord »
- Xavier Dolan dans « Illusions Perdues »
- Vincent Lacoste dans « Illusions Perdues »
- Karim Leklou dans « BAC Nord »
- Sylvain Marcel dans « Aline »
Meilleur espoir féminin
- Noée Abita dans « Slalom »
- Salomé Dewaels dans « Illusions Perdues »
- Agathe Rousselle dans « Titane »
- Anamaria Vartolomei dans « L’Événement »
- Lucie Zhang dans « Les Olympiades »
Meilleur espoir masculin
- Sandor Funtek dans « Suprêmes »
- Sami Outalbali dans « Une histoire d’amour et de désir »
- Thimotée Robart dans ‘Les Magnétiques »
- Makita Samba dans « Les Olympiades »
- Benjamin Voisin dans « Illusions Perdues »
Meilleur scénario original
- « Aline » de Valérie Lemercier
- « Annette » de Leos Carax
- « Boîte noire » de Yabb Gozlan
- « La Fracture » de Catherine Corsini
- « Onoda, 10 000 nuits dans la jungle » de Arthur Harari
Meilleur adaptation
- Yaël Langmann, Yvan Attal pour « Les Choses humaines »
- Audrey Diwan, Marcia Romano pour « L’Événement »
- Xavier Giannoli, Jacques Fieschi pour « Illusions Perdues »
- Céline Sciamma, Léa Mysius, Jacques Audiard pour « Les Olympiades »
- Mathieu Amalric pour « Serre moi fort »
Meilleurs décors
- « Aline »
- « Annette »
- « Délicieux »
- « Eiffel »
- « Illusions Perdues »
Meilleurs costumes
- « Aline »
- « Annette »
- « Eiffel »
- « Illusions Perdues »
Meilleure photographie
- Annette »
- « Illusions Perdues »
- « Les Olympiades »
- « Onoda, 10 000 nuits dans la jungle »
- « Titane »
Meilleurs effets visuels
- Sébastien Rame pour « Aline »
- Guillaume Pondard pour « Annette »
- Olivier Cauwet pour « Eiffel »
- Arnaud Fouquet, Julien Meesters pour « Illusions Perdues »
- Martial Vallanchon pour « Titane »
Meilleur montage
- « Annette »
- « BAC Nord »
- « Boîte noire »
- « La Fracture »
- « Illusions Perdues »
Meilleur son
- « Aline »
- « Annette »
- « Boîte noire »
- « Illusions Perdues »
- « Les Magnétiques »
Meilleure musique originale
- « Annette »
- « BAC Nord »
- « Boîte noire »
- « Les Olympiades »
- « La Panthère des neiges »
Meilleur premier film
- « Gagarine » de Fanny Liatard, Jérémy Trouilh
- « Les Magnétiques » de Vincent Maël Cardona
- « La Nuée » de Just Philippot
- « La Panthère des neiges » de Marie Amiguet, Vincent Munier
- « Slalom » de Charlène Favier
Meilleur film d’animation
- « Même les souris vont au paradis »
- « Le Sommet des Dieux »
- « La Traversée »
Meilleur court-métrage d’animation
- « Empty Places »
- « Folie douce, Folie dure »
- « Le Monde en soi »
- « Précieux »
Meilleur film documentaire
- « Animal »
- « Bigger Than Us »
- « Debout les femmes ! »
- « Indes Galantes »
- « La Panthère des neiges »
Meilleur court-métrage documentaire
- « America »
- « Les Antilopes »
- « La Fin des rois »
- « Maalbeek »
Meilleur court-métrage de fiction
- « L’Âge tendre »
- « Le Départ »
- « Des gens bien »
- « Les Mauvais garçons »
- « Soldat noir »
Meilleur film étranger
- « Compartiment N°6 » de Juho Kuosmanen
- « Drive My Car » de Ryûsuke Hamaguchi
- « First Cow » de Kelly Reichardt
- « Julie (en 12 chapitres) » de Joachim Trier
- « La Loi de Téhéran » de Saeed Roustayi
- « Madres Paralelas » de Pedro Almodóvar
- « The Father » de Florian Zeller