Ad Astra de James Gray : critique 

Publié par Sévan Lesaffre le 18 septembre 2019

Synopsis : À la faveur d’une mission spatiale cruciale, l’astronaute Roy McBride est amené à chercher la trace de son père disparu seize ans plus tôt dans l’espace.

 

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Ad Astra - affiche

Ad Astra – affiche

Seize ans après la disparition de son père (Tommy Lee Jones) aux confins du système solaire lors d’une périlleuse mission vers Neptune, l’astronaute Roy McBride (Brad Pitt) apprend qu’il est probablement encore en vie. L’aventurier du futur, qui peine à tisser le moindre lien humain, part à la recherche de son géniteur… Au cours de ce vertigineux voyage psychanalytique, il devra résoudre un dysfonctionnement qui menace la survie de la Terre. Après The Lost City of Z sorti en 2016, James Gray (La Nuit nous appartientThe Immigrant) s’essaye au film d’anticipation. Le cinéaste new-yorkais reprend le thème du père obsédé par la conquête de l’inconnu et adopte cette fois le point de vue du fils pour mettre en scène une aventure spatiale à la fois intime et spectaculaire. Ad Astra fait écho à d’autres grandes fresques telles que 2001, l’Odyssée de l’espace de Kubrick, Solaris de Tarkovski ou Apocalypse Now de Coppola. Il est question d’un voyage initiatique, d’un périple vers un territoire mystérieux mais dompté, au cours duquel le protagoniste, rongé par les doutes et les regrets, plonge en lui-même à mesure qu’il avance vers l’inconnu. Ici, le spectacle est intérieur, l’exploration spatiale est introspection. Parti à la recherche de preuves d’intelligence extraterrestre, Clifford McBride, astronaute pionnier dont on soupçonne la culpabilité quant à la destruction d’une station d’observation, a outrepassé la mission de ses commanditaires. Son fils, comme lui absorbé par sa carrière, a négligé sa famille. Il en prendra conscience lors de ces retrouvailles cosmiques.

 

Brad Pitt - Ad Astra

Brad Pitt – Ad Astra

 

Avec Ad Astra, James Gray vise l’infini et embarque le spectateur dans une épopée homérienne aux images époustouflantes. Le réalisateur bouscule les temporalités ainsi que la notion de frontière dans le but d’établir un univers sombre, hostile, inquiétant, hanté par les chefs-d’œuvre de la science-fiction, sans jamais en devenir l’esclave. Les corps flottent, emportés loin du soleil. Le cosmos est un « cadre » (à l’instar de la forêt amazonienne dans The Lost City of Z), celui de l’émancipation de Roy qui visite les planètes – dont la beauté surréelle est sublimée par la photographie toute en ombres et lumières de Hoyte Van Hoytema (InterstellarDunkerque) –, comme autant d’étapes à franchir vers la clé d’un mystère métaphysique et la construction de son identité. L’immensité étoilée engendre le vertige et permet la remise en question. Ad Astra s’interroge sur l’exil, la filiation, la vulnérabilité et la solitude de l’homme à travers le motif du reflet spéculaire. McBride, en pleine crise existentielle, s’en remet aux forces et aux pouvoirs de l’univers tandis que la voix off, employée pour la première fois par James Gray, donne accès à son « moi » intérieur.

 

Brad Pitt - Ad Astra

Brad Pitt – Ad Astra

 

Brad Pitt incarne avec brio ce héros en détresse muré dans le silence, personnage atypique dans la carrière de l’acteur qui allie à nouveau masculinité et élégance après Once Upon A Time in Hollywood. Il rejoint ainsi la Sandra Bullock de Gravity, le Ryan Gosling de First Man, le Matthew McConaughey d’Interstellar, l’Amy Adams de Premier Contact ou encore le Robert Pattinson de High Life. Non dépourvu de fantaisie, Ad Astra nous plonge dans un futur proche et décrit, à travers la transcendance du héros, la soif de conquête inassouvie des États-Unis. La sublime partition épurée de Max Richter (Marie Stuart, Reine d’ÉcosseHostiles) accompagne les morceaux de bravoure et autres scènes d’action comme l’interminable chute du cosmonaute, l’étourdissante poursuite lunaire ou l’attaque des singes de laboratoires enragés.

 

Fidèle aux relations père-fils qui jalonnent sa filmographie, James Gray, considéré comme l’un des plus grands cinéastes contemporains, signe une odyssée astrale œdipienne, intime et envoûtante. Si la rigueur scientifique n’est pas toujours au rendez-vous, Ad Astra dépeint les déraillements du monde et de la technologie et détourne habilement les codes de la science-fiction pour tenter d’échapper au carcan du genre. Une main tendue vers les étoiles…

 

 

 

  • AD ASTRA
  • Sortie : 18 septembre 2019
  • Réalisation : James Gray
  • Avec : Brad Pitt, Tommy Lee Jones, Ruth Negga, Liv Tyler, Donald Sutherland, Jamie Kennedy, Kimberly Elise, Ravi Kapoor, Loren Dean, Daniel Sauli, Anne McDaniels, John Finn…
  • Scénario : James Gray, Ethan Gross
  • Production : James Gray, Brad Pitt, Dede Gardner, Jeremy Kleiner, Anthony Katagas, Rodrigo Teixeira, Arnon Milchan
  • Photographie : Hoyte Van Hoytema
  • Montage : John Axelrad, Lee Haugen
  • Décors : Karen O’Hara, Kevin Thompson
  • Costumes : Albert Wolsky
  • Musique : Max Richter
  • Distribution : Twentieth Century Fox France
  • Durée : 2h04

 

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